Prendre le temps de changer de vie

Pour ma part, j’ai travaillé pendant une douzaine d’années dans un cabinet de conseil, à Paris. C’était dans la droite ligne des mes études. Au début, c’était passionnant. Et valorisant.
Ensuite j’ai appris à encadrer des plus jeunes, construit des expertises et monté petit à petit les « échelons ». L’ambiance était bonne, j’étais bien vu en interne et apprécié de mes clients. J’étais manager, responsable d’un secteur d’activité, et j’ai pu mettre en place plusieurs initiatives innovantes.
Mais au bout d’une dizaine d’années, la satisfaction n’était plus la même. J’avais la vague impression d’avoir fait le tour de pas mal de sujets.
Et les perspectives (de carrière et de nouveaux terrains de compétence à explorer) proposées ne m’excitaient plus.

Bien sur, je continuais à faire le job, mais je me souviens d’avoir dit à ma femme que je me considérais « en dépression ».
C’était un peu de fanfaronnade, c’était exagéré, ca sonnait faux, mais c’était aussi un peu vrai.

Le changement s’est fait petit à petit. Je me souviens que la naissance de mon premier enfant a été un événement déclencheur très important, car il m’a inscrit dans le temps : je ne pouvais plus dire « Plus tard, quand je serai grand, je ferai ce qui m’intéresse vraiment » : j’y étais.
Disons que je savais qu’il fallait que je change, mais je ne savais pas trop comment.
Je continuais à m’impliquer fortement au travail, mais peut-être de manière plus maitrisée.
J’ai fait un stage de méditation qui m’a fait beaucoup de bien, j’ai fait un bilan de compétence, j’ai envisagé de partir à l’étranger, j’ai répondu à des offres d’emploi et passé des entretiens, que j’ai arrêtés en cours de route car je n’y croyais pas...
Ca a pris 2-3 ans. Ca n’avançait pas tellement, mais au moins je savais de mieux en mieux ce que je voulais, ou en tout cas ce que je ne voulais plus. J’ai l’impression que c’est la première fois que je me posais sérieusement la question, en comprenant que la réponse que j’allais apporter conditionnerait une partie de ma vie.
Ce temps de « préparation » a été le bienvenu, car quand l’opportunité (la vraie) de changer de vie s’est présentée, du coup j’étais prêt, et on l’a saisie tout de suite avant qu’elle ne s’échappe.
Concrètement, on a quitté Paris pour partir à la campagne et j’ai changé de métier.

La décision a été prise très rapidement quand l’opportunité s’est présentée, mais on a aussi pris quelques mois pour préparer le changement (je sais que je ne suis pas trop casse-cou…).
Il y a eu une période d’atterrissage pas évidente d’environ 6 mois, où il a fallu prendre ses marques. Et on avait des enfants très jeunes.
Et puis les choses se sont mises en place petit à petit.
J’ai eu l’impression de respirer à nouveau, d’avoir reconquis ma liberté, d’être à ma place.
Ce sont de grands mots, mais c’est vraiment ce que j’ai ressenti.

Aujourd’hui, quand je regarde en arrière, les deux choses dont je suis le plus content sont d’avoir osé faire le grand pas du changement de vie (mais ca n’aurait pas été possible sans la période de maturation qui l’a précédé) et d’avoir quitté mon ancien employeur en très bons termes.